La donation en nue-propriété avec réserve d’usufruit successif

Il est courant que le nu-propriétaire d’un bien immobilier reçu par donation ou succession s’interroge sur l’opportunité de réaliser une donation de la nue-propriété qu’il possède à ses propres enfants. Dans cette perspective, le nu-propriétaire, second donateur, souhaitera, le plus souvent se réserver l’usufruit successif afin de jouir lui-même de l’usufruit dudit bien immobilier au décès du premier usufruitier (premier donateur de la nue-propriété).
 
Il existe une distinction entre la donation de la nue-propriété d’un bien avec réserve d’usufruit, donation de la nue-propriété d’un bien avec réserve d’usufruit successif.
Dans le premier cas, c’est le plein propriétaire du bien qui réalise une donation de l’immeuble en se réservant l’usufruit (avec réversion pour le conjoint survivant).
Dans le second cas, c’est le nu-propriétaire du bien qui réalise la donation de sa nue-propriété en se réservant l’usufruit successif. Cet article est dédié à cette seconde situation.
 
I / Le traitement civil de la donation de la nue-propriété avec réserve d’usufruit successif.
 
La donation avec réserve d’usufruit successif ne présente pas de difficulté majeure, même si la date de la survenance du décès du second donateur peut avoir une incidence non négligeable selon qu’il intervient avant ou après le décès du premier usufruitier (premier donateur). Le montage est en effet totalement légal.
 
Il y a alors deux distinctions à faire :
 
En cas de décès du donateur de la nue-propriété (second donateur) avant l’usufruitier initial (premier donateur), alors le donataire de la nue-propriété (celui qui à reçu la donation de la nue-propriété du second donateur avec réserve d’usufruit successif) devra rapporter civilement sa donation selon la valeur de la seule nue-propriété au jour de la donation.
 
En cas de survit du donateur de la nue-propriété (second donateur) et donc en cas d’ouverture de l’usufruit successif, alors le donataire de la nue-propriété (celui qui à reçu la donation de la nue-propriété du second donateur avec réserve d’usufruit successif) devra rapporter civilement sa donation selon la valeur du bien en pleine propriété.
 
II / Le traitement fiscal de la donation en nue-propriété avec usufruit successif.
 
La donation avec réserve d’usufruit successif s’analyse en une opération en deux temps :
 
1- Donation de la nue-propriété à l’enfant (donataire final) en fonction de l’âge de l’usufruitier initial (premier donateur) :
 
Au jour de la donation de la nue-propriété par le second donateur, la valeur de la nue-propriété donnée sera fonction de l’âge du premier usufruitier (premier donateur), vivant au jour de la donation car l’usufruit successif réservé par le second donateur n’est pour le moment qu’hypothétique. En effet, pour bénéficier, à son tour, de l’usufruit sur le bien donné, le second donateur devra être vivant au jour du décès de l’usufruitier initial.
Il s’agit d’une simple application de l’aliéna 2 de l’article 669 du code général des impôts : « Pour déterminer la valeur de la nue-propriété, il n’est tenu compte que des usufruits ouverts au jour de la mutation de cette nue-propriété. »
 
2- Au décès de l’usufruitier initial (premier donateur), l’usufruit successif ouvre un droit à restitution du trop payé.
 
Selon que le donateur de la nue-propriété (second donateur) est toujours vivant ou non au moment du décès de l’usufruitier initial (premier donateur), deux situations peuvent exister :
 
Si le donateur de la nue-propriété (second donateur) est décédé en premier, l’usufruit successif ne s’ouvre pas et l’enfant donataire de la nue-propriété avec réserve d’usufruit successif devient plein propriétaire du bien au jour du décès de l’usufruitier initial (premier donateur). Dans cette hypothèse, aucune imposition supplémentaire ne sera subie au jour du décès de l’usufruitier initial puisqu’elle aura été réglée successivement par les deux donateurs.
 
Si le donateur de la nue-propriété (second donateur) est vivant au décès de l’usufruitier initial, alors l’usufruit successif s’ouvre à son profit de plein droit. Dans cette hypothèse, le donataire de la nue-propriété (donataire final) aura payé des droits de succession sur une valeur de nue-propriété trop importante, fixée sur la base de l’âge de l’usufruitier initial. 
En effet, il aura payé des droits de succession selon l’âge de l’usufruitier initial (premier donateur) alors même qu’il attend le décès de l’usufruitier successif (second donateur), bien plus jeune, pour prétendre à récupérer la pleine propriété du bien.
 
En application de l’article 1965B du CGI, il pourra demander restitution des droits de succession payés en trop et basés sur l’age du premier donateur : « Dans le cas d’usufruits successifs, l’usufruit éventuel venant à s’ouvrir, le nu-propriétaire a droit à la restitution d’une somme égale à ce qu’il aurait payé en moins si le droit acquitté par lui avait été calculé d’après l’âge de l’usufruitier éventuel. »
 
Pour obtenir la restitution du trop perçu par l’administration fiscale, le nu-propriétaire doit présenter une demande dans un certain délai courant de la date du décès du précédent usufruitier et jusqu’au 31 décembre de l’année N+2.
 
En conclusion : En donnant aujourd’hui, le donateur (second donateur) est certain de la fiscalité qui sera applicable à la donation qu’il entend réalisée ; le mode de calcul du droit à restitution sera fonction de la fiscalité actuelle, de sorte que si la fiscalité des donations devaient être moins favorable dans l’avenir, c’est sur la base de la fiscalité actuelle que les droits de succession devront être calculés.

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